Une petite histoire de l’écosocialisme louviérois

juillet 6, 2023

À La Louvière (comme je pense en beaucoup d’endroits), parmi les sujets qui animent beaucoup, beaucoup de gens, on trouve les parkings, les sacs et taxes poubelles et le manque d’entretien des cimetières. Perso, je trouve très jolis ces cimetières pleins d’herbes folles, je trouve très jolies les herbes folles partout, mais les gens à qui ça déplaît arguent avec une certaine légitimité qu’ils payent les concessions, et on paie bonbon, c’est vrai. Ce à quoi les autorités communales rétorquent que c’est plus compliqué à gérer vu que maintenant, on ne peut plus utiliser de désherbants chimiques, et qu’en plus, la tonte tardive est bénéfique à la biodiversité. On nous a même demandé via des pubs à la télé de ne pas tondre durant tout un mois !

Mais bon, ça râle, du coup ça désherbe. Y en a même qui trouvent ça sale, des herbes folles. Un peu comme les poils au 21e siècle, quoi.

En septembre 2020, en plein cagnard, en plein covid et en plein confinement, on a reçu des amendes pour non-désherbage de trottoirs. 350 balles quand même. Sans sommation. À l’époque, je m’étais déjà énervée et j’avais réussi à faire sauter mon amende.

Depuis, je me suis renseignée. Enfin, j’ai tenté de me renseigner sur les raisons de cette obligation de désherber son trottoir et j’ai appris :

–  »Lorsque ces mauvaises herbes commencent à sortir des fissures de votre trottoir, elles commencent à éroder le béton. Si elles ne sont pas traitées, ces mauvaises herbes élargiront lentement les fissures au point de vous obliger à refaire votre trottoir ou terrasse. » Sauf que chez moi (comme dans la photo qui illustre l’article, ah ah), les mauvaises herbes ne poussent pas dans des fissures, ni dans du bêton, mais dans la terre, seul ciment entre les dalles.

– Que ça pouvait être pour des raisons de sécurité. Et ça, je peux le comprendre, quand comme ici, sur des trottoirs bordant des terrains publics, la végétation empêche d’emprunter une piste cyclable ou un trottoir

Les herbes sur mon trottoir ne sont pas dangereuses, du moins elles n’ont à ma connaissance jamais attaqué personne. Mais soit. Ayant appris récemment que des amis du coin avaient reçu la visite de la police ou un papier de la police les invitant à désherber leur trottoir, j’ai devancé les choses et entamé le désherbage. C’était le 28 juin dernier et j’ai eu le temps, en rentrant du boulot, de faire la moitié, en aspergeant mon oeuvre d’une potion non-polluante :

Depuis, il a plu. Beaucoup. Chaque fois que j’étais chez moi, que j’avais le temps et qu’il faisait clair.

Hier soir en rentrant, je trouve dans ma boîte le document suivant (on progresse, cette fois j’ai droit à l’avertissement).

Coup de bol pour moi, il refait beau et j’ai un employeur compréhensif, et comme l’avertissement ne me précise pas de combien de temps je dispose pour faire preuve de bonne citoyenneté, j’ai pu consacrer à l’improviste quelques heures de récup au finissage de ma grande oeuvre (dont ces ingrats n’ont même pas remarqué le début). Non sans repasser là où j’avais déjà désherbé, parce que vous savez quoi ? La chaleur et la pluie, ça fait en quelques jours pousser l’herbe même là où vous avez appliqué une potion magique préconisée par les autorités communales !

Ca m’a pris du temps. J’ai échappé à une mort certaine une ou deux fois parce que dans ma rue, les gens adorent se croiser à toute vitesse même quand il y a une pauvre femme épuisée gracieusement penchée sur des herbes folles. J’ai eu le temps de penser aussi. À ces policiers qui, nous dit-on à longueur de conseils communaux, n’ont pas le temps de faire leur indispensable travail de proximité et de sécurité, à cette amie qui a mal au dos, à cette vieille dame qui se cassait le sien l’autre jour pour échapper à l’amende qu’elle ne pourrait pas payer, à cette machine qui est passée tout désherber dans ma rue la veille du carnaval local en moins de temps qu’il ne m’en a fallu pour écrire ces quelques mots sur elle. Aux trottoirs désormais sans charme de mon village. À Sisyphe un peu aussi, mais ça, c’est parce que quand j’ai le temps de penser, j’aime cô bî me faire croire que je suis savante.

Au fait que j’ai passé des heures à faire un truc totalement con pour ne pas avoir à payer 350 balles à des gens qui se prétendent écosocialistes et nous menacent de 350 balles d’amende pour quelques brins d’herbe.

Dites-moi, cher.e.s élu.e.s, qui paie l’amende pour les trottoirs devant les terrains, écoles et bâtiments communaux ? J’ai plein de photos, j’en fais tous les jours. Et ça rapporte combien, une telle mesure, déduction faite du temps de travail consacré à ça par la police et le fonctionnaire sanctionnateur (sans compter les choses auxquelles ces gens auraient pu se consacrer pendant ce temps) ?

Je n’aurai probablement pas la réponse. J’avoue, je n’en peux plus de vous. Mais surtout, surtout, continuez comme ça. Parce que je ne suis pas la seule.

PS : Le bas de cet article de 2017 est très intéressant :  »Peut-on être sanctionné si on ne désherbe pas ?

Oui, si les herbes folles rendent la progression sur le trottoir dangereuse ou si elles provoquent la chute d’un passant. Mais, dans les faits, les fonctionnaires sanctionnateurs que nous avons contactés n’ont pas connaissance de sanctions en ce sens. Même chose pour l’utilisation de produits phyto sur le trottoir public. En théorie, le citoyen qui en utilise pour désherber peut recevoir une amende. En pratique, il faut le prendre en flagrant délit pour le sanctionner. »

2 Réponses to “Une petite histoire de l’écosocialisme louviérois”

  1. Brigitte Salkin said

    Hello Anne !
    pour info le mix sel/vinaigre/détergent est strictement interdit en Wallonie depuis quelques temps…
    http://environnement.sante.wallonie.be/news/sel-vinaigre-ou-eau-de-javel–pas-des-desherbants

    donc, si LL le conseille, ils sont hors la loi ?

    😉

    • annelowenthal said

      Hello ! Ah je me renseigne et j’adapte. C’est la recette qu’on m’avait donnée à la commune en 2020 !

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